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29th September 30th September 1th October

Beckett « borderless » : Dans le for extérieur de la boîte crânienne (proses et pièces pour la télévision)

Mireille Raynal-Zougari
Beckett a produit des foirades, des mirlitonnades, des pochades, des dramaticules, autant de genres hybrides, de textes pour rien et de « beckettises » qui montrent qu’il joue des médiums, et efface les frontières entre les genres : son écriture est à la fois chorégraphie, film, dévidage d’un texte, fabrique d’une image, théâtre de la parole, et son discours superpose la philosophie, la physique, la géométrie, la biologie, la poésie, le métalangage.

En ce sens, Beckett se situe au cœur des réflexions modernes sur les médiums en redéfinissant à tout moment le sien : texte et image ne sont jamais chez lui ce qu’ils auraient pu être. Sa prose comme ses expériences « médiatiques » (on pensera à Quad et autres pièces pour la télévision) proposent une communication ad libitum et dans tous les sens, à l’endroit comme à l’envers, un enchaînement infini d’images qui n’épuiseront jamais le visible mais l’approfondiront toujours en même temps qu’un retrait de ces mêmes images vers l’infini du zéro, vers l’état de la première image par laquelle tout a commencé.

« Loin en arrière de l’œil la quête s’engage » (Mal vu mal dit, p. 70). Si la longue-vue de Clov est braquée sur le zéro, en revanche la cécité ouvre à l’infini. Le monde s’informe dans le crâne, réserve de visibilité, zone d’organisation du visuel. Dans Le Dépeupleur, Beckett résume une poétique : « Le fond du cylindre comporte trois zones distinctes aux frontières précises mentales ou imaginaires puisque invisibles à l’œil de chair. ». Le texte beckettien révèle ainsi une cénesthésie mentale où l’infinité de points de vue et d’objets, l’espace caractérisé par les vastitudes de distance, un centre partout, une circonférence nulle part développent un univers virtuel.

La boîte crânienne de Beckett met à plat le mécanisme mental, la machine imaginaire, l’usinage linguistique, les conditions mêmes de la représentation, le réglage de l’appareil avant toute projection ; c’est un for extérieur, la clôture au bord de l’ouverture.

Beckett borderless : in the deep outside of the skull

Beckett created foirades, mirlitonnades, pochades, dramaticules, that is to say hybrids works, texts for nothing, jokes that reveal how he plays with mediums and rubs out borders between genres. His text, in a same time, looks like a film, a choreography, the unwinding of a writing, the making of an image, a scene of voices. His discourse crosses philosophy, geometry, physics, biology, poetry and next to them all, metalanguage.

In this way, Beckett takes a main part of contemporary thoughts upon mediums when he such gives at any moment a new definition of his own medium : texts and images never seem what they could have been. Beckett’s prose as well as experiences he had on television propose an endless communication, reversible in all senses, both the flood of images that never achieves the visible field but on the contrary digs deeply in it, and the withdrawal of those images towards zero, in direction of the first image from which everything starts.
« Loin en arrière de l’œil la quête s’engage » (Mal vu mal dit, p. 70). Whereas Clov trains his telescope on zero, blindness means infinity. The world takes its shape in the skull, which appears a reserve of visibility. In Le Dépeupleur, Beckett synthesizes his poetics : « Le fond du cylindre comporte trois zones distinctes aux frontières précises mentales ou imaginaires puisque invisibles à l’œil de chair. » This is to characterize his text as a mental coenaesthesia - drawing a virtual universe - including unlimited points of view and objects, an extremely wide space, a center everywhere with a nowhere circumference.

Beckett’s skull exhibits the mental mechanism, the machinery of the imagination, the work of language, in one word, the conditions of the representation, the adjustment of the apparatus before any projection of the inside.

It is a deep outside, the edge between close and open.


(University Toulouse-Le Mirail, Department of french literature)
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